« Le théâtre que j'aime dit des choses
qu'on n'a pas l'habitude d'entendre. Aujourd'hui, il y a
une imposture en France. Notre société recherche
frénétiquement du divertissement sous cellophane.
La nécessité du théâtre disparaît.
Le théâtre amateur est souvent plus "vrai"
que le théâtre professionnel.
Rien ne m'insupporte autant que le mensonge, les gens qui
font semblant. La fiction est une recherche de cette authenticité
qui nous manque. Je rêve d'un monde qui n'aurait pas
besoin de mon métier. »
Propos recueillis par Laurence Cazaux
« Christian RULLIER fait
partie des grands auteurs d’aujourd’hui, son
écriture est franche, généreuse,
violente, acerbe, inattendue, tous les ingrédients
sont là pour nous donner de l’émotion.
RULLIER écrit là où ça fait
mal, là où ça nous fait du bien.
»
JL BOURDON
Christian Rullier est né
en 1957 à Barbezieux.
Il a publié de nombreuses pièces de théâtre,
parmi lesquelles
Attentat meurtrier à
Paris 320 morts 800 blessés,
Annabelle
et Zina,
Le
Fils,
Il marche,
Il joue,
Football et autres réflexions,
C’est à dire aux Éditions Théâtrales;
L’Orphelinat,
ADN aux Éditions Lansman;
Femmmes,
Sur tout ce qui bouge – Cabaret furieux aux
Éditions Crater.
Avec Toute Mon Admiration,
Dernières
Outrances,
Sur Glane,
Moi et Baudelaire
aux Éditions Les Impressions Nouvelles
Il a également écrit
une vingtaine de films pour le cinéma et la télévision.
EXTRAIT :
"le mot du Parrain" (C. RULLIER) du 10ème
Festival de Théâtre Amateur de Carhaix
Le temps des passions
Aimer. Le mot majeur,
originel, du Théâtre Amateur. Un verbe dont
le monde a besoin, plus que jamais, dans le tourbillon des
épreuves, des violences et des vanités. Aimer.
L’un des derniers espaces de liberté où
l’humain peut se regarder, nu, dans la sincérité
de sa chair, dans la multiplicité de ses rêves,
de ses émotions, et laisser résonner sa voix
singulière. Aimer, oui. Offrir en partage l’originalité
de son être, de sa démarche intime, de ses
doutes et de ses convictions. Donner de soi, à connaître
de soi, pour que l’Autre, le voisin, le spectateur,
puisse oser à son tour appréhender le monde
sans l’appréhension de n’y être
pour rien. Tel est le lieu pour moi du Théâtre
Amateur, un lieu matriciel fondamental, authentique, où
les mots des auteurs prennent sens et se mettent en vie
bien au-delà de la représentation. C’est
le lieu de l’audace et du désir. Les énergies
qui s’y produisent sont en fraternité avec
celles de l’auteur, en vibration. Nul, en effet, n’est
obligé d’écrire, pas plus que de s’investir
dans l’existence d’une compagnie. Cet engagement
relève d’un choix, d’une passion, et
s’impose bientôt à soi-même comme
une nécessité profonde.
Ma rencontre avec
Pierre-Marie Quesseveur, que je dois à l’intuition
de Marie-Claude Le Stanc (Cie Les Arts Masqués),
n’est pas un accident. Elle s’inscrit pour moi
dans la logique des actions que je mène en faveur
du Théâtre Amateur, vecteur essentiel de la
création contemporaine dans les régions de
France. Ces milliers de compagnies, je les appelle «
les Sentinelles ». Ce sont elles qui sont à
l’affût, en embuscade derrière leurs
noms fleuris, poétiques et métaphoriques,
guettant le nouveau texte ou le nouvel auteur, questionnant
sans relâche la théâtralité d’une
œuvre, sa pertinence publique, expérimentant
sa gamme dramatique.
Vous imaginez le
bonheur, pour un auteur vivant, à une époque
où tant de structures professionnelles reçoivent
encore des pièces contemporaines avec la réaction
d’une huître découvrant un filet de vinaigre…
Lorsque Pierre-Marie,
oubliant, dans le feu emballé de la discussion, son
dernier train du soir pour la Bretagne, m’a proposé
de parrainer le 10ème Festival de Carhaix, c’est
avec joie que j’ai répondu “oui, d’accord“,
tout simplement, à cet honneur qui m’était
offert.
D’accord, oui, pour parrainer tout ce qui bouge, tous
les projets que la passion anime, pour parrainer toutes
les énergies créatives, généreuses,
de ces femmes et de ces hommes qui, quatre jours durant,
après tant de mois d’inventions, de travail
solitaire, de plaisirs partagés, vont nous donner
du paysage et nous ouvrir les voies des imaginaires d’aujourd’hui,
plus vivants que jamais…
Christian RULLIER