La pièce
« L’argument,
dans sa bouffonerie apparente la pièce au théâtre
de l’absurde : une ménagère, Germaine
LAUZON, gagnante d’un million de timbres-primes va
pouvoir remeubler sa maison à neuf. Pour ce faire,
elle invite ses sœurs, belles-sœurs et amies à
un « collage-party » où les langues s’activent
doublement. Volée par ses invitées, elle se
retrouve à la fin de la pièce aussi démunie
qu’auparavant. Une pièce pour rien…
L’intérêt
est ailleurs. Satire mordante et souvent très drôle
du Québec duplessiste(*), les Belles-Sœurs dresse
un portrait au vitriol de quinze femmes, de tous âges
mais de la même condition, marquées par les
préjugés, l’étroitesse d’esprit
et les aliénations. Le joual
fruste et violent est bien propre à traduire leurs
rancœurs et leurs frustrations tandis que les chœurs
parodiques renouvellent la dramaturgie.
La pièce signe résolument
l’émergence du nouveau théâtre
québécois. »
MARIE-LYNE PICCIONE (Michel
Tremblay, l’enfant multiple, Presses Universitaires
de Bordeaux)
(*) Maurice DUPLESSIS :
homme politique québécois, leader des Conservateurs,
il fut Premier ministre du Québec de 1936 à
1939 et de 1944 à 1959.
En 1968, a lieu la première
représentation des Belles-Sœurs à Montréal.
La création soulève les passions par la controverse
sur la langue utilisée : le joual,
idiome populaire typiquement montréalais qui fait
s’entrechoquer sacres, jurons et expressions vulgaires,
dans un français fortement anglicisé : Michel
Tremblay dira qu’il
n’a pas à s’en défendre. «
On comprendra que cette pièce était impensable
autrement qu’en joual
». Le joual,
avec des accents de vérité efficaces, symbolise
l’infériorité des Québécois.
La polémique ne
concerne pas que la langue. En effet, dans l’optimisme
ambiant de la « Révolution tranquille »
qui a suivi le conservatisme de Duplessis, la satire sociale
prend tout le monde à contre-pied.
La pièce, incantatoire,
impose Michel Tremblay
comme auteur dramatique.
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